Jean Luc Rocha
Chef et MOF
« La persévérance, la passion et l’acharnement ont fait que tu arrives au bout de tes objectifs »
Le Pompon – Épisode 118
Jean Luc commence son interview en me disant que son parcours n’est pas atypique. Il a fait une école hôtelière, a travaillé avec des bons chefs et des Meilleurs Ouvriers de France, ouvre son restaurant en mars 2023… un parcours classique ?
Exceller dans l’univers de la cuisine reste accessible qu’à une poignée de chefs passionnés. Seulement 200 MOF en cuisine dans le monde : la preuve est que Jean Luc est un personnage atypique !
J’ai toujours été baigné là-dedans, dans le beau, la précision, le geste, surtout dans l’intelligence de la main
Fils et petit-fils d’ébéniste, Jean Luc a toujours été entouré d’artisans, d’hommes et de femmes qui font avec leurs mains.
La famille Rocha est connue pour être une importante famille d’entrepreneurs, de la branche du BTP à la ferronnerie d’art, l’intelligence de la main est présente dans les gênes. Il souhaite d’abord se diriger vers la pâtisserie ou -étonnament- l’ébénisterie, et c’est finalement la cuisine qui prendra le dessus.
Si dans 10 ans je suis pas chef j’arrête le métier, sinon je suis MOF
Et quand il se lance dans une aventure, il y va pleinement. A 20 ans, le chef (et son mentor) Gilles Blandin, le pousse à venir travailler à ses côtés. Jean Luc s’engage dans une expérience marquante avec déjà l’ambition d’exceller dans son domaine : si à 30 ans il n’est pas MOF, il change de branche et arrête la cuisine !
Sauf qu’à 30 ans, en candidat libre, Jean Luc devient l’un des plus jeunes MOF en cuisine. Une consécration qui le place dans les meilleurs cuisiniers de sa génération et meilleur tout court : avec Philippe Etchebest et récemment Jérôme Schilling à Saint Emilion, ils sont les trois seuls MOF des environs.
La persévérance, la passion et l’acharnement ont fait que tu arrives au bout de tes objectifs
Vouloir devenir chef et MOF est une chose. Le devenir en est une autre. C’est par son envie chevillée au corps que Jean Luc s’engage dans un parcours d’excellence. Il a testé d’autres métiers et dans la cuisine a trouvé quelque chose auquel s’accrocher.
Nos vies aujourd’hui, à un moment donné t’as besoin d’être seul, et t’as aussi besoin d’être en équipe
L’esprit d’équipe et la solitude : deux notions qui peuvent se faire face et qui sont pourtant complémentaires.
C’est par le sport que Jean Luc se construit et va chercher dans un sport individuel et collectif une partie de ses valeurs.
Adolescent, il évolue en équipe de France de Handball et pratique le judo (coucou David Inquel, ancien judoka de haut niveau). Le handball en équipe, le judo en solo : un bon équilibre qui lui sert aujourd’hui : le chef tout seul ne fait rien, il a besoin des autres pour proposer sa cuisine.
En équipe on grandit, on avance, on apprend des autres, on donne aussi : c’est un perpétuel échange
C’est ce mélange de moments seul, où il a besoin d’être dans sa bulle, de se concentrer et se recentrer aussi, à ces moments d’équipe, de rush, que Jean Luc trouve l’équilibre. Ce perpétuel échange dont il parle, qu’il a avec ses équipes et aussi évidemment, ses clients.
En 2002 un long chapitre de son histoire s’ouvre : Jean Luc rejoint Thierry Marx au Relais&Chateaux Cordeillan Bages dans le Médoc. Une histoire avant tout de coup de coeur sur un lieu emblématique et d’une belle aventure à rejoindre aux côtés du chef Thierry Marx.
L’aventure se déroule bien, très bien même puisqu’en 2005 il devient chef exécutif du lieu, en 2010 le chef Marx part pour de nouvelles aventures et Jean Luc conserve les deux étoiles de la table. Une suite logique pour celui qui gérait les cuisines depuis déjà quelques années.
L’intelligence de la main, elle est super importante
Et l’une de ses mains, Jean Luc a failli en perdre l’usage. Une opération simple qui se transforme en cauchemar pour lui : après 5 opérations et un médecin qui lui dit de changer de métier, le coup est dur à encaisser. Il me partage ses ressentis dans l’épisode et la difficulté de ce moment passé.
Sauf que tu l’auras compris, Jean Luc est plutôt du genre à trouver la solution et dépasser les épreuves !
La cuisine ça sert à réunir les gens
Réunir les gens c’est son crédo et c’est pourquoi il a ouvert le Ro’cha en mars. Situé à quelques pas (littéralement) du Parc Bordelais, ce restaurant racheté par Jean Luc est à son image : chaleureux et bien pensé.
Évidemment le bois prend part à la décoration, et pas n’importe lequel : du bois récupéré qui partait à la benne. Il a récupéré des barriques pour les transformer : porte couteau, cache-radiateur, appliques aux murs… la déco du lieu est éco et responsable. Un régal de venir manger dans ce lieu !
Plus qu’un restaurant d’ailleurs, c’est un lieu de vie puisqu’à l’étage il y a une salle de réunion, une salle à manger et un salon : tout ce qu’il faut pour passer du temps avec ses équipes, ses amis, en famille !
Il faut qu’elle soit rassurante, plaisir, résonnante de souvenir
Sa cuisine fait du bien, aux yeux, aux papilles et à l’esprit. Jean Luc crée ses plats selon ses envies, ses coups de coeur, ce qu’il trouve le matin au marché… il se laisse porté par l’inspiration et cela rend sa cuisine vivante !
Tout y est d’ailleurs expliqué : le choix, l’équilibre, sa façon de cuisiner… j’ai eu le plaisir d’y déjeuner à deux reprises et à chaque fois j’ai pu un peu papoter avec lui. Être là pour les autres, c’est aussi la patte Jean Luc Rocha.
Heureusement qu’il y a de la peur, c’est ce qui fait avancer, ce qui te fait te remettre en question, t’analyse les choses un peu plus. Il faut avoir peur.
Bien sûr des risques, Jean Luc en prend régulièrement. Fermer le week-end et le mercredi soir est un risque. Une manière aussi de peut-être plus facilement recruter dans un secteur en tension. Il essaye toujours de minimiser le risque et j’aime cette philosophie !
J’ai eu le plaisir d’enregistrer cet épisode au restaurant et de découvrir se philosophie de vie !
Un épisode à écouter sur les principales plateformes d’écoute !
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