Sally TM
Photographe
« Je me suis dit ok, comment je peux montrer à des filles qu’elles méritent d’être aimées. »
Le Pompon – Épisode 134
Je dis souvent sur le Pompon que j’essaye de comprendre comment les personnes reçues, en sont arrivées là où elles en sont aujourd’hui. Et pour révéler la beauté pure du corps féminin, Sally TM a énormément vécu.
J’ai commencé à faire des photos, tout le temps, tout le temps, tout le temps
Il y a deux éléments qui font que Sally arrive aujourd’hui à capter l’essentiel dans ses photos : son rapport au beau et son rapport au corps.
Son rapport au beau, elle l’a développé dès le plus jeune âge. Petite, elle grandit en Andalousie, entourée de couleurs, d’environnements différents, d’une richesse architecturale et naturelle qui viennent nourrir sa créativité. Adolescente, c’est au Brésil qu’elle habite régulièrement, et là aussi elle capte des univers, une colorimétrie, des ambiances qui attisent sa curiosité et son regard.
Petite je n’avais pas conscience qu’il y avait des types de corps différents
Son rapport au corps lui, est d’abord très décomplexé : en Espagne, il y a des personnes à l’aise dans toutes leurs morphologies, les personnes âgées ne sont pas cachées comme en France, à la plage, toutes et tous se mélangent.
Au Brésil, le rapport au corps est encore plus décomplexé. L’esthétique de tous ces corps lui apporte énormément. Et le rapport des femmes avec leur corps varie dans ces deux régions du monde, avec une puissance féminine qui s’exprime sans tabous.
Si je m’étais écoutée, je n’aurais pas fait d’études
Bercée toute son enfance par différentes cultures et des parents décomplexés dans leur rapport au corps, Sally rentre en France d’abord pour passer son BAC, puis pour faire les études que les autres voulaient qu’elle fasse. Bonne élève, elle obtient plusieurs écoles et c’est la fac qu’elle choisit pour faire Lettre et Art sur Paris.
Au delà des cours, et des armes obtenues pour mieux découvrir l’esthétique des choses, Sally me partage ces années à plonger, à tomber de plus en plus bas dans la dépression.
Car derrière ces décors colorés, ces corps décomplexés, Sally souffre. Le rapport avec son propre corps est lourd, les réflexions blessantes et elle accumule plusieurs “dys” comme elle le dit.
C’est la drogue qui m’a tenue
Dès le lycée puis ensuite à Paris elle s’est mise à ce qui semblait normal chez elle, chez ses parents et leurs amis : la drogue. Pas pour planer ou aller ailleurs, mais au contraire pour tenir : se lever le matin, pour étudier, se concentrer, sortir de chez elle…
Elle est en “roue libre de dépression”, elle touche le fond sur son rapport au corps, aux hommes, à la sexualité. Ce que me partage Sally dans l’épisode est dur à entendre, surprenant parfois vu le recul avec lequel elle aborde cela, mais ce fond touché, touché profondément, il fait partie d’elle.
J’ai vite compris que les secrets, c’est ça qui détruisait les gens
Sally a toujours parlé, c’est ce qui fait la richesse de ses séances aujourd’hui, sa capacité à tout aborder sans tabous. Raconter son histoire, cela fait partie de sa personnalité. D’une certaine manière cela doit sûrement l’aider, et si cela peut aider les autres à mieux la connaître, se sentir mieux compris, plus en confiance, alors tant mieux.
On aborde le fonctionnement du cerveau et sa capacité à dissocier les choses. Car dans ses moments dépressifs, elle a toujours cherché une solution.
Là ça a été un soulagement, je me suis dit : ok ma vie peut commencer
Et c’est une opération qui va tout changer. A 21 ans, elle souhaite faire une réduction mammaire, car son bonnet I-J était devenu un trop gros handicap physique et mental. Mais, trop droguée, elle ne passe pas la “formalité” de la prise de sang pour l’anesthésie générale.
C’est la première fois de sa vie qu’on lui explique que la drogue, c’est mal.
Quelques mois plus tard, après avoir arrêté la drogue (le déclic a été efficace), elle redécouvre qui elle est avec une nouvelle poitrine : elle ne se dégoutait plus, aimait la vie, se redécouvre complètement.
Je me suis rendue compte qu’on était souvent confrontées aux mêmes soucis, même si on a pas eu les mêmes histoires
Après quelques mois de voyage en Asie du Sud-Est seule, Sally revient en France pour développer son activité de photographe. D’abord pour des photos de mode, pour des marques, et petit à petit le portrait et le nu vont faire leur apparition.
Son rapport au corps, accumulé avec les années et diverses expériences plus ou moins traumatisantes, vont lui apporter un regard riche sur ceux des autres, et notamment ceux des femmes. Elle commence alors à photographier des femmes en sous-vêtement, parfois nues, et passe un moment très intime avec elles.
Je me suis dit ok, comment je peux montrer à des filles qu’elles méritent d’être aimées
Elle découvre la thérapie par l’image : comment gagner en confiance en soi grâce à la photo. Un chemin qu’elle va commencer à suivre, puis développer au fil des séances.
Ni thérapeute, ni magicienne, Sally, de par son histoire assez costaud, arrive à parler, faire parler puis mettre en confiance les femmes qui viennent la voir, pour mettre en valeur toute la beauté de leur corps.
Car Sally, au delà de son enfance chahutée, a subi plusieurs agressions sexuelles, des viols, et puise dans son passé pour se révéler. Une manière de libérer la parole de l’autre, et donc de la mettre à l’aise.
Ce que je trouve cool c’est de voir évoluer sur 1h30, la confiance et la puissance d’une meuf
Sally me partage certaines de ses séances et les retours qu’elle a reçu, avec beaucoup de changements sur la vision du corps : certaines femmes modifient leur façon de s’habiller, de se tenir, de danser, leur sexualité… Les bienfaits sont nombreux et la confiance est doublement boostée !
D’abord pendant la séance, avec la fierté de femmes qui osent franchir la porte, osent se mettre à nu et se sentir sensuelles, puis quand elles reçoivent leur photo 30 jours plus tard.
Pendant très longtemps j’avais l’impression que ça m’impactait pas du tout
L’impact des séances sur les femmes qui viennent peut changer positivement une vie. Mais Sally, qui donne beaucoup pendant un shooting et reçoit énormément, se rend compte aussi de l’énergie demandée lors d’un shooting. Au delà de la photo, de l’art derrière l’appareil, les histoires entendues viennent forcément l’impacter intérieurement, inconsciemment ou non.
En 5 ans d’activité elle sort -déjà- de son 3e burnout… Elle me raconte comment elle essaye de ne pas reproduire les erreurs du passé, en réduisant le nombre de shooting, en prenant beaucoup de temps seule et en travaillant parfois avec des marques qui ont une grande communauté, toujours dans l’objectif d’avoir un impact positif le plus large possible grâce à ses photos.
J’avais ce gros problème de légitimité donc je voulais le beau starterpack
Sally a eu très jeune un appareil photo, et quand elle a voulu en faire son métier, elle a tout de suite voulu sortir l’artillerie lourde pour faire de belles photos. Elle est d’ailleurs allée chercher des subventions pour lancer son activité et les anecdotes à ce sujet méritent d’être écoutées !
Puisque sa force a été de rapidement créer une communauté sur les réseaux sociaux. A la fois via la qualité de ses photos et aussi en parlant d’elle, son compte Instagram est suivi par plus de 45k abonné·e·s.
On parle des femmes qu’elle photographie et aussi beaucoup d’elle, de ses démons, ses doutes, de la force intérieure qui l’a pousse à exceller dans son domaine.
S’écouter, même si c’est pour se planter, c’est pas grave. S’écouter, écouter son instinct, tester des choses
Sally essaye aujourd’hui de s’écouter un peu plus, de ne pas reproduire les erreurs du passé. Erreurs qui font évidemment partie d’elle, mais qui la renforcent.
Alors maintenant elle cherche à vivre aussi pour son plaisir, à grandir sans forcément travailler plus. Puis elle va bientôt créer un podcast avec une amie pour aborder tous les sujets qu’elle retrouve dans sa vie et lors des shootings : légitimité, confiance en soi, rapport au corps…
Un épisode marquant, tant pas la dureté du passé de Sally que par sa capacité à avancer aujourd’hui et permettre à beaucoup de femmes à se sentir mieux dans leur peau.
Merci à Sally de s’être autant révélée, c’est un très bel épisode qui donne quelques uppercuts et donne envie de profiter de la vie pleinement.
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